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Jeudi matin [22-го августа 1835 г. Митава].

Me voilà à Mitau. J’attends avec impatience le moment d’arriver à Riga pour prendre des chevaux de poste. Le petit ne va pas plus mal, mais il n’est pas bien: il ne mange absolument rien, — il ne se nourrit que de boissons et il avale quatre à cinq cuillers de bouillon, voilà tout; mais il est assez tranquille en voiture, toujours triste, bien faible et maigre, — maigre que cela fait mal à voir. En vérité je perds quelquefois entièrement la tête.

Comme je voudrais être auprès de mes parents! Le temps me paraît d’une longueur affreuse, pourtant c’est bien demain le 10-me jour de mon départ; le cocher aurait envie de me mener jusqu’à Pétersbourg, mais moi je n’ai nulle envie: il a fait crever son meilleur cheval, en lui donnant à boire, lorsqu’il était échauffé, et ensuite il ne s’est pas soucié d’appeler un Канавалъ; c’était avant hier; le cheval tombait à tout moment, et il le faisait relever à coups de bâton; a peine arrivé à une station, le pauvre animal ne se releva plus; il m’a acheté un autre, mais tous les 4 ne valent pas le diable par le sable et les montagnes que nous allons avoir. Онъ меня однако со всемъ этимъ разсмѣшилъ. Я ему сказала: «Твоя лошадь до Риги не дойдетъ». — «А Богъ то на что?» fut sa réponse. C’est tout à fait russe.

J’espère dans 6 jours être à Pétersbourg, même en m’arrêtant la nuit; je ne veux pas perdre un instant à Riga, j’enverrai tout de suite prendre la подарожная. Ici j’ai revu une ancienne connaissance — M-r Wittenheim; sa femme est à la campagne, sa visite m’a fait plaisir, il m’a consolé au sujet du petit. À propos: il a fait une dent, mais l’autre à côté n’a pas encore paru, — j’espère que tout son mal ne provient que de là, son teint s’est éclairci un peu. —

Adieu, mon bon ami, il faut envoyer à la poste pour faire faire maintes et maintes choses, hâter les gens qui ne font que

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manger, et puis dormir en voiture. Pierre se conduit très bien, je lui ai dit que si je suis contente de lui, je ne ferai pas de plaintes à mon père; on peut le prendre par la douceur. Enfin c’est un bon garçon, — il est d’une, gaieté folle; j’aime mieux ça, je Vous l’avoue, que les phisionomies sournoises des domestiques. Bonjour.

На оборотѣ: Его Высокоблагородію Николаю Ивановичу Павлищеву. Въ Варшавѣ. À Monsieur Pavlistcheff, Sous-Secrétaire d’état près le Conseil d’Etat à Varsovie. Помѣта Н. И. Павлищева: expédiée jeudi, c. à d. 22 Août/3 Septembre 1835, reçu lundi ce 26/7.