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Le 17 Nov[embre 1831 г. Петербургъ].

Monsieur Karostovzoff part cette nuit. Il est venu hier pour me le dire; c’est pour la première fois que je l’ai vu

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depuis son arrivée; lorsqu’il m’a apporté Votre lettre, je n’ai pas été à la maison et je n’ai pu envoyer chez lui, ignorant son logement. Sa tête est plus grosse que son poing, mais je ne sais si elle en recélle plus de cervelle. Imaginez, mon bon ami, que lorsqu’il vint pour la première fois et ayant appris que j’étais chez Md Lermantoff, — par conséquant assez près de chez moi, — il m’envoya chercher, ne voulant pas remettre la lettre ou débiter son nom à ma fille de chambre, ni promettre de revenir encore. Mlle Cruche1) vint toute ésoufflée pour me conter l’histoire au moment, où je fesais mes adieux aux Lermantoff, — ce qui fit que j’ôtais mon chapeau et mes gants et restais une heure de plus chez eux. En revenant à la maison, je ne le trouvais plus, Dieu merci.

Savez-Vous, mon cher, que depuis je n’ai pas reçu une ligne de Vous — aucune réponse à trois de mes lettres. On prétend que c’est un très bon signe, lorsqu’on n’écrit pas — preuve qu’on s’amuse, mais moi, — cela ne m’arrange d’aucune façon. Je Vous attendais avec Mr Enguel, car on croyait et l’on croit encore qu’il sera nommé Ministre de l’Intérieur, mais à présent je ne sais plus que penser, sinon qu’en Vous faisant mes adieux j’avais raison de pleurer si fort Votre départ. Le Belérophon ci-dessus nommé m’a dit que Md Enguel était revenue, mais pour combien de temps et à quel propos, il en a gardé le secret, en dépit de tous mes efforts pour l’apprendre et lui tirer les vers du nez. Un de ces jours j’irai absolument chez elle. — Je suis bien fâchée que je ne savais pas d’avance que notre Belérophon partait et où il demeurait; il m’a fâché la première fois, mais il paraît être un bon diable avec sa tête d’Hyppopotame; il faut le trouver à la maison. À propos, encore un trait: il a commencé par venir chez mes parens afin d’apprendre

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mon adresse qui était bien sur la lettre! Qu’en dites-Vous?

Adieu, mon cher ami, je n’ai pas envie de Vous écrire davantage, puisque je ne reçois plus de Vos nouvelles; je me bornerai donc là, en Vous disant que la baronne Delvig est mariée à Mr Serge Baratinski1) et mariée depuis le mois de Juin, mais elle n’a déclaré son mariage que depuis un mois; c’est encore une franche coquine que cette ex-baronne, que Dieu me pardonne! Elle est à Moscou. Quant à ma belle soeur2), c’est la femme la plus à la mode ici. Elle est dans le très grand monde et on dit en général qu’elle est la plus belle; on l’a surnommée „Psychée“.

Adieu, portez Vous bien. Mes compliments à la Comtesse Zaluska..... Venez-Vous me prendre? — répondez sur ce point, au moins. Je n’ai pas reçu d’après le papier au nom de Lermantoff, — c’est perdu apparement.

Помѣта Н. И. Павлищева: 5/17 Décembre.

Сноски

Сноски к стр. 105

1) Груша — горничная Ольги Сергѣевны. Л. П.

Сноски к стр. 106

1) Вдова поэта барона Антона Антоновича Дельвига — баронесса Софья Михайловна, рожденная Салтыкова; она вступила во второй бракъ съ братомъ поэта Евгенія Абрамовича Боратынскаго — Сергѣемъ Абрамовичемъ Боратынскимъ. Баронъ Дельвигъ скончался 14-го января того же 1831 года.

2) Наталья Николаевна Пушкина.