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Le 3 février 1837. [Варшава].

Les lettres de Moscou arrivent bien lentement, mon cher Papa: celle que Vous m’avez écrite le 12 de Janvier ne m’est parvenue que depuis quelques jours, et puis je vois que Vous n’avez pas reçu toutes les miennes; Vous ne me parlez que d’une seule, de mon avant-dernière, et rien de celle que je Vous ai écrite le 6 de Décembre. C’est décourageant,

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cela ôte la moitié du plaisir de la correspondance. — Je suis bien contente que Vous avez reçu des nouvelles de Léon; il est singulier et se plaint de ce qu’on ne lui écrit point, tandis que lui-même n’écrit à personne et qu’il ne dit pas où il se trouve, mais, comme lui, je me plaindrai de l’oubli de mes connaissances de Pétersbourg, qui non seulement ne m’écrivent pas, mais ne me répondent pas — ni M-me Timoféef, ni M-me Ocipoff, ni Catherine Ivelitch, ni M-lle Paskévitch. Alexandre1) pourtant nous a envoyé une missive2), mais elle ne contenait que quelques lignes pour mon mari, tracées à la hâte en réponse à une lettre, écrite encore au mois de juillet, et qu’il a interprétée tout de travers, en ne s’étant pas donné la peine de la lire jusqu’au bout, et il ne fait aucune mention des deux autres, que mon mari lui a écrites d’ici. On voit qu’il est très affairé et de mauvaise humeur. Le 4-me volume de son journal est embelli par sa production Капитанская дочка; il y a longtemps que je n’ai rien lu d’aussi intéressant en Russe.

J’ai encore à Vous remercier, mon cher Papa, pour les 900 roubles que Пеньковской3) vient de m’envoyer après avoir payé les intérêts au lombard; ils nous furent d’un grand secours et nous vinrent très à propos. Vous n’ignorez pas sans doute qu’on décompte une partie des émolumens de mon mari pour payer les dettes, de manière que nous sommes un peu serrés; dans le nombre de nos créanciers (de la plupart des quels nous sommes débarrassés, Dieu merci) se trouvait M-r Pagodine4), который не посовѣстился подать къ взысканію за тысячу рублей, которые мужъ у него занялъ, будучи еще при нёмъ. Je Vous dit ceci en

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passant, pour Vous donner une idée de la délicatesse de ce beau monsieur, qui regorge d’argent; aussi je suis bien contente, que mon mari n’est plus auprès de lui; ce ne sont que des Loguinoff qui peuvent lui convenir et qu’il ne cessera de protéger. A propos, mon cher Papa, Пеньковской nous écrit que Vous Vous proposez d’aller à Pétersbourg, mais comme la date de sa lettre est antérieure à la Vôtre et que Vous ne m’en dites rien, je crois que Vous n’avez plus ce projet.

Nous avons un hiver extrêmement rigoureux, — pour un hiver à Varsovie, s’entend; depuis plus d’un mois toujours des gelées le matin, qui dépassent souvent 10 et 11 degrés; c’est désagréable, pourtant je me promène beaucoup à pied et fais promener le petit, qui s’est développé physiquement et moralement surtout d’une manière visible, mais il est un peu gâté et pleureur comme de raison, ce qui m’agace beaucoup les nerfs. Du reste, je me porte aussi bien, que mon état peut me le permettre; j’ai même beaucoup repris à ce qu’on prétend, et cela peut être, car j’ai très bon appetit, et, grâce à une plus commode distribution des chambres, je passe bien les nuits. La première fois je Vous enverrai le plan de notre logement; il était prêt, mais pour le moment je ne sais plus, où je l’ai mis. Vous verrez, comme ce logement nous convient, et vu les prix d’ici c’est très bon marché: nous payons 2000 florins, ce qui fait 1200 roubles. Ce qui me charme — c’est un jardin et le voisinage des Lazenki1). Adieu, mon cher Papa; de grâce, mes respects à ma Tante, à mon Oncle et mille choses aux cousines2), que j’embrasse aussi tendrement que possible. Je Vous baise les mains; mon mari vous présente ses respects.

Lolo se rappelle très bien de vous и вашъ Лорнетъ и Зарему и Руслана и Дѣича (Андреича). Сей часъ подходилъ и сказалъ: Мама пишетъ письмо дѣди.

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M-me Lang et M-me Ocounef se rappellent à Votre souvenir; la première va loger dans la même maison que nous. — Mille choses à M-me Dorhoff (?) et à Dachinka et à M-me Pouchkin Alexandrine avec (?) Baratinsky en particulier. Et M-e Jakovlef l’avez-Vous vue?

Сноски

Сноски к стр. 101

1) Александръ Сергѣевичъ. Это письмо его сестры написано послѣ кончины Пушкина, о которой Ольга Сергѣевна еще не знала.

2) Письмо это неизвѣстно.

3) Іосифъ Матвѣевичъ Пеньковскій, управляющій Нижегородскимъ имѣніемъ Пушкиныхъ. См. замѣтку В. В. Каллаша въ „Быломъ“ 1907 г., № 5, стр. 53.

4) См. о немъ выше.

Сноски к стр. 102

1) Лазенки — живописный паркъ близъ Варшавы. Л. П.

2) Сонцевы.